Journaliste à l’ère numérique: un rappel salutaire

31/01/2013 - 09:17 Journaliste à l’ère numérique: un rappel salutaire



Par Prashant RAO




Un photographe prend une image du PDG de Facebook Mark Zuckerberg à Menlo Park, Californie, le 15 janvier 2012 (photo: AFP / Josh Endelson)
AFP / Josh Endelson

AMMAN – Dans le cadre d’un projet de l’Union européenne auquel participe, entre autres, la Fondation AFP, j’ai passé une semaine à Amman pour former un groupe de reporters jordaniens et palestiniens aux bases du journalisme numérique : comment animer un blog, comment utiliser la quantité incroyable de matériel à notre disposition sur internet pour rendre des histoires plus attrayantes et plus informatives, comment vérifier l’information, ou encore comment se protéger dans le cyberespace. La Fondation AFP fait partie d’un consortium mené par BBC Media Action, qui a remporté un appel d’offres de l’UE pour former des journalistes de 17 pays d’Europe de l’Est et de la rive sud de la Méditerranée pendant trois ans. Je fais partie de la dizaine de formateurs fournis par l’AFP.
Vaste sujet pour seulement cinq jours de formation. Mais nos stagiaires étaient enthousiastes. Timides au début, ils n’ont pas tardé à discuter et à contester nos affirmations, et à poser des questions vraiment difficiles (NB : comme la plupart des journalistes, je préfère toujours être celui qui pose les questions enquiquinantes que celui qui y répond).

A Amman, des journalistes jordaniens et palestiniens s'initient aux techniques du journalisme numérique en décembre 2012 (photo: AFP)
AFP

J’espère que cela leur aura été utile. En tout cas, cela l’aura été pour moi. J’ai pu me rappeler pourquoi nous nous astreignons souvent à accomplir des tâches fastidieuses, chronophages et dont l’utilité ne saute pas immédiatement aux yeux.
Pourquoi vérifions-nous toujours les données Exif –les informations de base comme la date, l’heure, les réglages de l’appareil et éventuellement la géolocalisation – sur chaque photographie que nous recevons ? Parce que ces métadonnées peuvent en dire long. Le fondateur de la firme antivirus McAfee, recherché au Belize pour assassinat, a été retrouvé en partie parce que des journalistes du magazine Vice se trouvaient avec lui, avaient pris une photo de lui et l’avaient mise sur internet. Leur erreur ? Ils avaient pris la photo à l’aide d’un iPhone qui avait enregistré leur localisation précise, révélant que McAfee avait fui le Belize et se trouvait au Guatemala.
Tout comme dans la «vie réelle», nous devons faire attention aux informations que nous possédons sous la forme numérique. Et toujours nous demander si nous en faisons assez pour protéger nos sources.

Une page Facebook appartenant à John McAfee (photo: AFP / Karen Bleier)
AFP / Karen Bleier

Pourquoi est-ce que je passe du temps à apprendre à utiliser Google Analytics et à essayer de comprendre les mécanismes de référencement sur les moteurs de recherche, même si cela n’a a priori rien à voir avec mon métier ? Parce qu’il existe un immense trésor, sous la forme de données accessibles gratuitement, qui nous aide à produire ou à partager des contenus de façon plus intelligente et ciblée. Je sais, par exemple, que le gros des lecteurs de mon blog arrivent via des liens publiés sur Twitter et Facebook, que la majorité habite les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France, et que 10% d’entre eux utilisent un téléphone portable ou une tablette. Cela me fait réfléchir à la façon dont je gère mon site.
Pourquoi je crée des mots de passe alphanumériques extrêmement longs ? Pourquoi ai-je la manie de sauvegarder toutes mes données sur de multiples supports, aussi bien sur internet qu’en dehors ? Un matin, à Amman, j’ai trouvé un message de l’hébergeur de mon blog m’informant qu’une adresse IP non identifiée et suspecte avait essayé de s’introduire dans mon compte depuis un lieu indéterminé. Peu après, j’ai reçu un mail de Facebook à propos d’un changement de mot de passe que je n’avais pas sollicité....


Tout de suite, j’ai changé tous mes mots de passe de tous les services auquel je suis abonné. J'ai révoqué toutes les permissions d’accès de toutes les applications sur tous les réseaux sociaux dont je fais partie. Le journaliste du site internet Wired Mat Honan a décrit, avec force détails, comment des hackers avaient littéralement anéanti sa vie en ligne en à peine vingt-quatre heures. Je ne veux pas que cela m’arrive à moi. Si mon travail consiste à rapporter des informations, alors la sécurité de l’information doit être ma priorité principale. «Avant, quand j’avais le choix entre la simplicité d’utilisation et la sécurité, je choisissais la simplicité»,  regrette Honan. Désormais, après avoir lu son récit, je choisis toujours la sécurité.
C’est un cliché que de dire que le journalisme est en train de changer à très grande vitesse. Mais les séances de formation et l’enthousiasme de nos stagiaires à Amman m’ont servi de rappel : partout dans le monde, jour et nuit, des journalistes sont en train d’apprendre des nouvelles techniques. Si nous ne prenons pas le temps de comprendre, par exemple, pourquoi il est préférable de prendre des photos en format RAW, ou la différence entre Wordpress et Tumblr, quelqu’un d’autre le fera, et nous deviendrons les laissés pour compte.

Pendant une conférence de presse de Washington Capitals à Arlington, Virginie (Etats-Unis) en novembre 2011 (photo: AFP / Patrick McDermott)
AFP / Patrick McDermott

Prashant Rao est le directeur du bureau de l'AFP à Bagdad.COPIADO http://www.afp.com

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