Le pape appelle l'Eglise à "sortir du catalogue des péchés"

Le pape François, le 15 novembre, au Vatican.

Le pape appelle l'Eglise à "sortir du catalogue des péchés" 15


Dans "Evangelii Gaudium", le premier texte officiel de sa main, François promeut "une Eglise pauvre pour les pauvres" et plus ouverte.
LE MONDE | • Mis à jour le | Par
Le pape François, le 15 novembre, au Vatican.

Il y avait eu les gestes inédits, les discours fondateurs, les petites phrases bien senties, les entretiens sans filet. Le pontificat du pape François dispose désormais de sa première feuille de route officielle. Le Vatican a rendu publique, mardi 26 novembre, la première exhortation apostolique signée du pape argentin, dans laquelle François propose une longue synthèse de la manière dont il envisage le rôle des croyants et « la mission évangélisatrice » de l'Eglise catholique dans le monde actuel.

Contrairement à l'encyclique sur la foi publiée en juillet et cosignée avec Benoît XVI, qui était clairement l'œuvre de son prédécesseur, l'exhortation Evangelii Gaudium, sur « l'annonce de l'Evangile dans le monde d'aujourd'hui », porte l'empreinte de François. Sans bouleverser la doctrine, il y promeut « une Eglise pauvre pour les pauvres », plus ouverte qu'autocentrée, plus collégiale que centralisée, plus axée sur la miséricorde que sur la condamnation, plus « audacieuse, créative, fervente, cordiale et joyeuse ». Des orientations qu'il a largement évoquées au cours des neuf mois de son pontificat, mais qu'il développe et théorise pour la première fois.
MOYENS ET TERMES « BERGOGLIENS »
Ce texte arrive à point nommé. Depuis son élection, le pape a beaucoup parlé et certains catholiques commençaient à se demander ce qui, dans ce foisonnement, relevait de la pensée personnelle de Jorge Mario Bergoglio et ce qui s'inscrivait dans le magistère – la parole officielle – de l'Eglise. D'autres pointaient son « anti-intellectualisme » et son goût exclusif pour les phrases chocs. Les péripéties autour de l'entretien publié dans La Repubblica en octobre – dont la teneur relevait plus d'une « reconstruction » par le journaliste que d'une transcription des propos du pape – avaient fini d'inquiéter les tenants d'une parole papale sans ambiguïté.
En élargissant les thèmes abordés au-delà de la seule évangélisation, Evangelii Gaudium confirme le cap papal. Si la feuille de route est classique « tout baptisé est un missionnaire évangélisateur » –, les moyens et les termes pour la remplir sont bien « bergogliens ». « Un évangélisateur ne doit pas avoir constamment une tête d'enterrement. » Avec « joie et enthousiasme, il doit aller sans crainte chercher ceux qui sont loin, inviter les exclus ». « Je préfère une Eglise accidentée, blessée et sale pour être sortie par les chemins, plutôt qu'une Eglise malade de la fermeture et du confort », rappelle François.
Le pape confirme aussi son « option préférentielle pour les pauvres », en se démarquant une nouvelle fois des théologiens de la libération. « Les pauvres sont les destinataires privilégiés de l'Evangile », insiste-t-il. Mais cette option est « théologique avant d'être culturelle, politique ou philosophique ». Revenant sur les « maux du temps », le pape condamne avec force « la main invisible du marché », dénonce les disparités sociales, plaide pour plus d'éthique dans la finance et « exhorte les pays à une généreuse ouverture envers les migrants ».
Dans une longue charge contre les ravages de la « mondanité spirituelle », qui « derrière les apparences de religiosité consiste à rechercher la gloire humaine et le bien-être personnel », il met aussi en garde les croyants contre « les conquêtes sociales et politiques, le fonctionnalisme de manageur, l'autosatisfaction égocentrique ».
HIÉRARCHISATION DES PRIORITÉS
Sur les moyens encore, le pape semble convaincu de l'adaptation de l'Eglise au contexte local. Il invite chacun à « repenser les structures, le style et les méthodes de ses propres communautés » et préconise « un processus résolu de discernement, de purification et de réforme ». Pas question pour autant d'adapter le message. Ainsi sur l'avortement : le pape reste ferme dans son opposition, mais appelle à un meilleur accueil des femmes ayant avorté. De même, « le sacerdoce réservé aux hommes est une question qui ne se discute pas », même si la place des femmes dans l'Eglise peut être améliorée.
Sur le message de l'Eglise, le pape suggère aussi aux clercs une hiérarchisation des priorités, notamment en ce qui concerne l'enseignement moral de l'Eglise. Ils demandent aux pasteurs de ne pas être « obsédés par la transmission désarticulée d'une multitude de doctrines qu'on essaie d'imposer à force d'insister », de sortir du « catalogue des péchés et des erreurs ». Il leur rappelle que le « confessionnal ne doit pas être une salle de torture » et les invite à des homélies plus « positives » que « purement moralistes ou endoctrinantes ». Sans citer explicitement les fidèles privés de communion, comme les divorcés-remariés, le pape rappelle que « l'Eglise n'est pas une douane et qu'il y a de la place pour chacun avec sa vie difficile ».
Dénonçant encore les divisions entre chrétiens ou le relativisme croissant, appelant à une meilleure sélectivité dans le recrutement des clercs, pointant les richesses et les dérives de la « piété populaire », revenant sur les relations avec l'islam et la liberté de culte que doivent accorder les pays musulmans aux chrétiens, le pape balaie large. Avec ce premier texte magistériel, il va au-delà des gestes et de son statut naissant d'icône, et engage les catholiques dans « une période évangélisatrice plus fervente », conscient d'un contexte de sécularisation qui ne doit pas « faire taire » leurs convictions.
Stéphanie Le Bars
Journaliste au Monde

COPY http://www.lemonde.fr/

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