Stages pour les jeunes de banlieue: "il faudra bien préparer les collégiens et les entreprises" (association) Banlieues: Macron appelle, sans plan chiffré, à "changer de méthode"

Stages pour les jeunes de banlieue: "il faudra bien préparer les collégiens et les entreprises" (association)

POOL/AFP / ludovic MARINEmmanuel Macron a dévoilé le 22 mai 2018 à Paris une série de mesures pour les quartiers défavorisés s'inspirant, en partie seulement, du rapport Borloo.
Proposer des stages de 3è aux jeunes de banlieue: Bastien Le Coz, jeune entrepreneur et créateur de l'association "Un stage et après", qui développe l'accueil de stagiaires de quartiers défavorisés, salue l'initiative d'Emmanuel Macron mais insiste sur la nécessité de bien préparer les jeunes et les entreprises.
QUESTION: Emmanuel Macron a annoncé que 15.000 stages de 3è vont être proposés par les entreprises et 15.000 autres par l'Etat pour en faire profiter les jeunes des quartiers en difficulté. Que pensez-vous de cette initiative ?
REPONSE: Pour 850.000 élèves chaque année, le stage en entreprise est la première, et pour certains, parfois, la seule rencontre avec le monde professionnel. Depuis 2005, il est obligatoire mais souvent vu comme une contrainte pour les parents, les professeurs et les entreprises, et peut s'avérer très discriminant pour les élèves. Cela fait 10 ans que nous nous battons au quotidien pour valoriser ce stage d'observation. Nous ne pouvons que nous réjouir de voir le président mettre en avant ce dispositif qui présente tant d'avantages pour les collégiens et les professionnels qui les accueillent.
En pleine transition entre le collège et le lycée, ce stage est l'occasion parfaite pour redonner du sens à ce que les élèves étudient à l'école. Les quartiers défavorisés sont particulièrement touchés par le décrochage scolaire des jeunes qui ont du mal à se projeter dans leur futur. C'est pour cela que nous avons choisi de leur ouvrir leurs horizons en leur présentant des options qu'ils n'imaginent pour la plupart même pas. Dans les quartiers ou les villages enclavés, on ne pense pas à aller voir ce qui existe dehors. L'autocensure est une des premières difficultés.
Par ailleurs, des discriminations subsistent car de nombreux quartiers sont encore jugés sur des préjugés et non sur la qualité de ses jeunes.
Q: Qu'est ce que cette expérience peut concrètement leur apporter ?
R: Souvent, le collégien n’a pas une idée précise de son avenir professionnel. Il est encore un peu tôt pour y penser sérieusement. Le stage d’observation, en plus de lui permettre de découvrir le monde du travail, l’aide à réfléchir à son orientation. C’est en classe de 3e que se prend l’une des décisions les plus importantes pour sa scolarité : le choix de son orientation en filière générale ou professionnelle. Un stage réussi, ce sont de meilleures notes dès le trimestre suivant, et une meilleure compréhension pour l’élève de sa scolarité. Un stage réussi, c’est une vraie barrière de protection contre le décrochage scolaire.
On aide à réparer les fractures sociales du pays avec ce droit qu'ont les collégiens, et ils n'en ont pas tant que ça. Les entreprises ont, elles, le devoir de tendre la main aux adolescents, d'imaginer une place pour eux.
Q: Comment pourra-t-on s'assurer que ces stages auront une véritable utilité ?
R: 30.000 offres ne sont pas la garantie de 30.000 stages réussis. Aux débuts de l'association, nous proposions une banque de stages, jusqu'à ce qu'on prenne conscience de l'importance de la préparation. Car sans préparation, cela risque d'être du +one shot+ pour les entreprises. Elles peuvent ne plus jamais vouloir entendre parler de stagiaire. De leur côté, les jeunes peuvent ressortir traumatisés par l'expérience. Notre expérience nous a appris l'importance de préparer les uns et les autres. Parce que trouver le stage idéal et accueillir un stagiaire ne s'improvise pas, nous proposons un programme pédagogique adapté pour préparer les uns et les autres à cette rencontre. Bien préparer un stage permet un stage réussi et un stage réussi redonne du sens à la scolarité

Banlieues: Macron appelle, sans plan chiffré, à "changer de méthode"

POOL/AFP / LUDOVIC MARINEmmanuel Macron, le 22 mai 2018 à l'Elysée
Pas de plan chiffré mais un changement de méthode pour rétablir l'égalité: des places en crèche aux stages de 3e, Emmanuel Macron a dévoilé mardi une série de mesures pour les quartiers défavorisés s'inspirant, en partie seulement, du rapport Borloo.
"Je ne vais pas annoncer un plan banlieues", a déclaré le chef de l'Etat, dans la salle des fêtes de l'Elysée où étaient réunis plus de 600 acteurs de terrain et presque tout le gouvernement. Car "on est au bout" de ce qu'a pu produire cette stratégie "aussi âgée que moi", a ajouté M. Macron, pour qui "poursuivre dans cette logique est poursuivre dans l'assignation à résidence, la politique spécialisée, et je n'y crois pas".
Appel aux entreprises, stages, école: pendant une heure trente, le chef de l'Etat a toutefois déroulé une liste de mesures, non chiffrées, en donnant un rendez-vous d'étape en juillet à divers acteurs de cette "mobilisation" visant à "construire une politique d'émancipation".
Un "comité de suivi", composé de personnalités tournantes, se réunira ensuite tous les deux mois, a-t-il détaillé, en rappelant les mesures gouvernementales dont ont déjà bénéficié les quartiers: police de proximité, dédoublement des classes de CP, mise à l'amende des consommateurs de cannabis...
Les banlieues "ne demandent pas d'assistance" mais leur "place dans la République", avait auparavant déclaré Jean-Louis Borloo, auteur d'un rapport très commenté sur l'avenir des 1.300 quartiers prioritaires en métropole où habitent cinq millions de personnes.
"Tous les sujets du rapport ont été cochés", s'est félicité l'ancien ministre de la Ville après le discours, alors que beaucoup prédisaient un enterrement de son rapport.
Parmi les mesures effectivement reprises, la mise en chantier d'une "cour d'équité territoriale" ou la création de "30.000 places en crèche" pour favoriser le travail des femmes avec une subvention de "1.000 euros par place" dans les quartiers.
Alors que le chômage touche un quart de la population et un tiers des jeunes de ces quartiers, le chef de l'Etat a appelé les 120 plus grandes entreprises françaises à "prendre leur part" sur l'emploi et l'apprentissage, en diversifiant les embauches (avec des tests anti-discrimination dans les trois ans) et en proposant des stages aux élèves de 3e (15.000, soit autant que l'Etat).
- "Défaut de concret" -
Mais sur la rénovation urbaine, noeud de l'action publique dans les quartiers, Emmanuel Macron n'a pas repris telle quelle la proposition ambitieuse de "fondation nationale" de Jean-Louis Borloo, évoquant une opération "cœur de quartiers" d'ici juillet et une action sur les copropriétés dégradées.
Du côté des élus, qui croyaient beaucoup au plan Borloo, la déception était palpable: "Défaut de concret", pour Patrice Bessac, maire PCF de Montreuil (Seine-Saint-Denis), "petits pas" pour Stéphane Gatignon, l'ex-maire de Sevran...
Il y avait "de vraies attentes dans les quartiers", notamment sur la rénovation urbaine, a déploré le maire divers-gauche de Villiers-le-Bel, Jean-Louis Marsac, pour qui "l'analyse est bonne" concernant la sécurité mais "les moyens n'y sont pas", avec 1.300 policiers promis pour 60 quartiers.
Le chef de l'Etat, qui a annoncé un plan de lutte contre le trafic de drogue "d'ici juillet", s'est aussi ému des discours racistes et antisémites "en train d'empirer" et de la radicalisation "qui dans certains quartiers a gagné, est en train de gagner".
A ce sujet la présidente du FN, Marine Le Pen, a raillé "la politique de l'autruche" du gouvernement sur le "fondamentalisme islamiste". Le patron des Républicains, Laurent Wauquiez, a critiqué une "politique spectacle", sans "rien derrière" et qui délaisse "les territoires oubliés de la République".
POOL/AFP/Archives / ludovic MARINEmmanuel Macron et Jean-Louis Borloo, le 22 mai 2018 à Paris
Avant la réunion, animée par l'humoriste Yassine Belattar, M. Macron avait débattu pour la première fois avec les membres du Conseil présidentiel des villes, 25 acteurs locaux.
Une volonté d'interpellation directe des acteurs de terrain qui justifie, selon M. Macron, de ne pas imposer d'en haut des solutions toutes faites: Un plan élaboré par "deux mâles blancs qui ne vivent pas dans ces quartiers" n'aurait "aucun sens", selon lui.

COPY  https://www.afp.com/fr

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