Soupçons de conflit d'intérêt: le secrétaire général de l'Elysée visé par une enquête
AFP/Archives / Patrick KOVARIKAlexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée le 13 juillet 2017 à l'Elysée
Le bras droit d'Emmanuel Macron a-t-il favorisé un armateur privé impliqué dans des discussions avec l'Etat et auquel il est étroitement lié ? Après l'annonce lundi d'une plainte de l'association Anticor, le parquet national financier (PNF) a fait savoir qu'il enquêtait sur ces soupçons de conflit d'intérêt.
L'Elysée a réagi en indiquant que son secrétaire général, Alexis Kohler, avait "pris note" de la plainte déposée contre lui par l'association anticorruption. La présidence a rejeté "des soupçons totalement infondés jetés sur lui à l'évidence en raison de ses fonctions".
Dans cette plainte pour "prise illégale d'intérêt" et "trafic d'influence" envoyée vendredi au PNF, Anticor dénonce les liens familiaux et professionnels étroits qui existent entre le numéro 2 de l'Elysée et l'armateur italo-suisse MSC, client important de STX France, les chantiers navals de Saint-Nazaire.
De loin le plus grand pourvoyeur de commandes de ces chantiers, l'armateur a joué un rôle essentiel dans les discussions sur leur avenir menées avec l'Etat français.
Sans attendre cette plainte d'Anticor révélée lundi par RTL et Le Monde, le PNF avait lancé des investigations. Lundi, il a annoncé avoir ouvert une enquête "à la suite de la publication de plusieurs articles de presse", initiés par Mediapart début mai.
Confiée à la Brigade de répression de la délinquance économique, elle vise à "vérifier si les règles relatives à la mise en disponibilité des agents publics ont bien été respectées", indique le PNF dans son communiqué.
Dans sa plainte consultée par l'AFP, Anticor reproche à M. Kohler d'avoir siégé comme représentant de l'Etat au conseil d'administration de STX France à partir de 2010 alors qu'il "ne pouvait ignorer qu'il existait un conflit d'intérêt", l'armateur MSC ayant été fondé et dirigé par les cousins de sa mère.
Anticor rappelle aussi que ce haut fonctionnaire quadragénaire a voulu à deux reprises rejoindre l'armateur après avoir été directeur adjoint de cabinet au ministère de l'Economie, entre 2012 et 2014 quand le poste était occupé par Pierre Moscovici et entre 2014 et 2016 quand Emmanuel Macron lui a succédé.
La première fois, en avril 2014, la commission de déontologie, l'instance chargée de contrôler le départ des agents publics dans le secteur privé, s'était opposée à sa demande.
Mais en août 2016, quand Emmanuel Macron avait quitté Bercy, Alexis Kohler avait finalement obtenu le feu vert de la commission et rejoint MSC Croisières comme directeur financier.
Tout en occupant ces hautes fonctions chez l'armateur, il était devenu un membre actif de la campagne présidentielle d'Emmanuel Macron.
Sur cette période, Anticor soupçonne Alexis Kohler d'être intervenu comme cadre de MSC dans une réunion à Bercy en mars 2017 sur la reprise de STX France, alors menacé de faillite.
STX France avait finalement fusionné avec son concurrent italien Fincantieri et MSC n'était pas monté au capital du groupe comme il le souhaitait.
- Pas "d'affaire", selon Castaner -
Neuf mois après son arrivée chez MSC, M. Kohler avait rejoint M. Macron pour devenir son secrétaire général de l'Elysée, un poste de tour de contrôle crucial dans le fonctionnement de l'exécutif.
Interrogé par Médiapart, Alexis Kohler a déclaré qu'il a "toujours informé sa hiérarchie des situations dans lesquelles il aurait pu se trouver en conflit d'intérêts" et "s'est toujours déporté pour éviter lesdites situations".
Christophe Castaner, délégué général de la République en marche, est venu à son secours lundi en affirmant qu'il n'y avait pas d'"affaire" Alexis Kohler. "Je ne qualifie pas d'+affaire+ le fait qu'une structure, Anticor, qui est habituée à cela, multiplie les initiatives et les perde souvent", a taclé sur Public Sénat le secrétaire d'État chargé des Relations avec le Parlement.
M. Castaner a cependant jugé "normal" qu'Anticor "puisse saisir la justice si elle a un doute".
Depuis plusieurs années, cette association est devenue un acteur, parfois contesté, de la justice financière qu'elle a plusieurs fois bousculée avec des plaintes à fort retentissement médiatique.
Ces derniers mois, l'association a réussi à faire condamner le patron de Radio France Mathieu Gallet pour favoritisme et obtenu la relance de l'enquête pour "prise illégale d'intérêts" visant le chef de file des députés LREM Richard Ferrand.
AFP / Agnès COUDURIER-CURVERCapture d'écran d'une vidéo de l'AFPTV tournée au lycée "autogéré" de Paris dans le XVe arrondissement
"On part à Fontainebleau pour une journée +escalade+, vous venez ?" Au lycée "autogéré" de Paris, qui scolarise des jeunes venus chercher une alternative au système traditionnel, il n'y pas que les révisions du bac au programme en cette fin d'année.
C'est le professeur de physique, tenue sportive de rigueur, qui va superviser l'activité.
Pendant ce temps, dans le jardin de ce lycée public du XVe arrondissement où poussent des herbes folles, quelques élèves au look décontracté, voire excentrique, profitent des tables en bois pour discuter ou écouter de la musique.
Rémi et Louis, en Terminale S, ont, eux, investi une classe de chimie pour réviser le bac. "Normalement, on a cours à cette heure-là, mais aujourd'hui on est seuls, l'autre prof est parti en voyage avec une partie de la classe", explique Louis, 18 ans. Plongé dans un livre d'exercices, il est décidé à s'accrocher : "Je vais devoir travailler dur si je veux l'avoir".
Au lycée autogéré, dit "LAP", il y a moins de bacs blancs que dans un lycée traditionnel, ou "tradi", comme disent les "LAPiens". Et encore moins de notes. C'est d'ailleurs ce qui a poussé Rémi, 18 ans, à s'y inscrire il y a trois ans. "Si tu leur demandes gentiment, les profs peuvent accepter de te noter, mais ce n'est pas du tout la règle", explique-t-il.
Ici, pas de hiérarchie non plus, ni de proviseurs ou de surveillants. Tout le monde tutoie tout le monde. "Un élève vaut autant qu'un prof, et une personne égale une voix", résume Frédéric, 63 ans, professeur de mathématiques.
Il raconte être arrivé au LAP il y a dix-neuf ans un peu par hasard. Et n'en être jamais reparti. "J'aime la liberté qu'on y a", déclare-t-il en déambulant dans un couloir recouvert de dessins et graffitis.
Dans ce lycée expérimental créé en 1982, environ 240 élèves sont venus chercher ce qu'ils ne trouvaient pas ailleurs : une ambiance conviviale, presque familiale, de la liberté et une kyrielle d'activités, proposées parallèlement aux cours (vélo, sérigraphie, court-métrage, maroquinerie...).
Seuls une poignée d'établissements de la sorte existent en France.
- Libre fréquentation -
Se revendiquant comme un "espace de liberté", le LAP a été plusieurs fois la cible d'attaque par des militants d'extrême droite, la dernière en date à la mi-mars.
Le lycée parisien est régi par deux principes : la libre fréquentation et l'auto-gestion. Elèves et profs prennent ensemble, en commissions, toutes les décisions concernant l'organisation de l'établissement et statuent sur les dossiers de candidature des lycéens. Aucun cours n'est obligatoire et rien n'empêche par exemple un élève de Seconde de suivre un cours de philo de Terminale.
Revers de la médaille : "Aucun prof ne préviendra les parents si vous n'êtes pas là, donc le risque, c'est de glisser dans l'absentéisme", ont prévenu les élèves de la commission "accueil" lors d'une réunion d'information qui a fait salle comble mi-mai.
"Moi, j'ai du mal à travailler chez moi, alors je viens à tous les cours", confie Laetitia, en Terminale L, arrivée ici en Première. Ancienne élève d'un lycée classique, elle n'en "pouvait plus de la pression". "Je plongeais", dit-elle. Désireuse de poursuivre des études de musicologie, elle s'épanouit notamment en participant au projet de "comédie musicale".
Dana, 17 ans, en Terminale S, a de son côté appris au lycée autogéré à "être à l'aise en public", elle qui se disait auparavant "très timide". En Seconde dans un lycée "tradi", elle se souvient de "beaucoup trop de stress". "Ici, on te pousse moins, il faut s'impliquer tout seul, ce n'est pas la même difficulté", estime-t-elle.
Si la plupart des élèves espèrent obtenir le bac, "l'examen n'est pas forcément vu comme une fin en soi", explique Frédéric. Le taux de réussite --environ 40%-- y est d'ailleurs bien inférieur à la moyenne nationale (88%). Mais "s'ils n'étaient pas venus ici, beaucoup ne l'auraient jamais passé", rappelle le professeur.
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